
Quatre personnes sont attablés dans la cuisine, en train de manger. Pourtant, aucun mot ne romps le silence. On n’entend que la conversation des objets inanimés. Le bourdonnement du frigo répond au tic tac de l’horloge. Les couverts bavardent entre eux en salves de cliquetis, et la télévision murmure, seule dans son coin. Les chaises se querellent mollement en couinant sous les mouvements des corps se passant le sel, le pain ou les plats.
Quatre personnes ont réunis leur solitude pour le repas. Pour autant, ils ont encore moins à se raconter que les choses qui les entourent. Le mutisme couve cette famille, comme si tout avait déjà été dit, alors que tout reste à dire. Le silence entre eux enfle comme un furoncle que personne n’ose percer. Il est enkysté depuis si longtemps que sa peau en est épaissi au point que le crever devient presque impossible et trop douloureux.